L'Île-St-Denis : la possibilité d'une écologie populaire

Long croissant sur la Seine, L’Île-St-Denis (93), à une dizaine de kilomètres au nord de Paris, est un de ces lieux où l’on teste avec 7000 habitant·e·s une écologie en action, à l’initiative d’une administration qui réunit depuis 2001 Vert·e·s et militant·e·s associatifs/ves. Entretien avec Élisabeth Bourgain, adjointe au maire.

L’An 02 : Aujourd’hui on parle beaucoup d’écologie urbaine, où le développement durable croise opportunément la volonté d’attirer dans des centres-villes rénovés des populations aisées exigeantes sur la qualité de leur environnement. Vous portez avec d’autres, à L’Île-St-Denis, une vision où le social n’est pas oublié. Une écologie populaire ? sociale ?

Élisabeth Bourgain : Nous parlons en effet d’écologie populaire. C’est à dire d’une écologie qui concerne tout le monde. Notre ville est une ville populaire. Une population qui vit à 70 % dans du logement social. Majoritairement des ouvrier·e·s et des technicien·ne·s – et des chômeurs/ses.

Nous sommes persuadé·e·s que l’écologie doit améliorer la vie de chacun·e et, dans le même temps, respecter les enjeux de survie de nos descendant·e·s. Quelques exemples…

La restauration scolaire est un moment important d’éducation. On y mange de plus en plus bio, et même végétarien une fois par semaine. Les enfants découvrent. Une diététicienne veille sur les menus et anime des ateliers. Elle fournit même aux familles des conseils pour respecter un équilibre alimentaire entre le repas de midi et celui du soir. Certains esprits chagrins se sont inquiétés : « Comment, pas de viande pour des enfants pauvres qui n’en mangent souvent qu’à la cantine ? » Cela a été l’occasion de faire de l’éducation populaire dans les comités de quartier, et de faire circuler Bidoche, le livre de Fabrice Nicolino (1)…

Dans les bâtiments communaux, on chauffe moins, on a mis un peu partout des dispositifs pour que la lumière s’éteigne quand il n’y a personne, une « cellule énergie » regroupant des techniciens et des élus a passé au crible tout ce qui était source de gaspillage… 30 % d’économie réalisés.

Dans une école, des panneaux solaires produisent de l’électricité. Un grand panneau à l’entrée mesure la production et les économies de CO2 réalisées. Les enfants peuvent ainsi mesurer l’importance de ces panneaux.

Nous avons aussi installé des panneaux solaires sur le gymnase municipal et incité un bailleur à intégrer la pose de panneaux solaires sur un très grand pignon exposé plein sud, dans le cadre de la réhabilitation de cette cité.

Mais aussi des gestes simples de tous les jours. Le tri sélectif, ça existe un peu partout maintenant. Mais le compost ? Est-ce réservé à ceux et celles qui ont des jardins ? Pas du tout. Nous encourageons les habitant·e·s de grands ensembles à mettre en commun leurs épluchures. C’est le cas dans une cité à côté de chez moi : les habitant·e·s collectent leurs déchets organiques. L’association HALAGE, qui anime des chantiers-écoles dans les métiers de l’environnement, entretient ce compost ce qui permettra dans quelques mois de l’utiliser pour enrichir la terre des plantations des espaces communs… Et d’organiser une fête du compost, pour planter des fleurs et des plantes avec les enfants en utilisant ce fameux compost.

(1) Bidoche. L’industrie de la viande menace le monde , Les Liens qui libèrent, 2009.